La librairie d'Hippolyte 3 Place d'Armes

La librairie d'Hippolyte 3 Place d'Armes

"Hypolite" Carrier naît à Izeaux le 10 août 1845, sa mère Victoire Carrier, ouvrière en soie, a une liaison avec Hippolyte Alexis Brun-Buisson, maître cordonnier. Mais peut être  les parents d'Alexis voient-ils d'un mauvais oeil cette possible union ? Les deux amoureux continuent à se voir. Finalement ils convoleront en juste noce en janvier 1854, union qui permet de légitimer la naissance d'Hypolite.

Ainsi en 1854 à l'âge de 9 ans, "renaît" Hippolyte Brun-Buisson ! 

Une enfance dans la belle campagne d'Izeaux où s'activent cordonniers et tisserands. Très vite il apprend les rudiments du métier dans l'atelier de son père mais aussi entourés de ses oncles tous cordonniers. Il faut dire que son caractère s'est endurci pendant  son enfance, difficile de ne pas être reconnu par son père ! Alors il rêve d'autre chose ! Son jeune frère Joseph suit lui aussi les traces de son père. 

Il faut dire que le travail du cuir le passionne mais il n'entend pas rester cordonnier et il se trouve à l'étroit dans ce village. Alors une fois ses 20 ans passés et la nouvelle taxe versée à l'Etat permettant l'exemption du service militaire, il prend son baluchon et part par les routes pour approfondir ses connaissances sur le travail du cuir.

Et on le retrouve ouvrier-relieur à Dijon.

C'est pendant cette période qu'il fait la rencontre de Anne Jeanne Guignard , cette jeune couturière qui habite au Creusot chez ses parents. Et il réitère le comportement de son père, il met enceinte la jeune fille, encore mineure, à peine 18 ans ! Mais Hippolyte assume et cette Jeanne décidément lui plaît bien. Il n'y a qu'à publier les bans, demander le consentement notarié de ses parents qui ne se déplaceront pas et le tour est joué ! Jeanne est enceinte jusqu'aux dents lorsque les deux jeunes gens se présentent à la mairie du Creusot le 20 juin 1867 à 2 heures de l'après-midi.

Belle journée ! Bien sûr les parents de Jeanne sont présents François Guignard, charpentier et Louise Joussier domiciliés Route de Montcenis au Creusot et les témoins , amis du jeune couple Jean Arligny et Antoine Charlet tous deux instituteurs, Jean Mathé tourneur et Emile Nardon, forgeron, tous quatre du Creusot. Le jeune couple s'installe pour un temps à  Saint-Symphorien-de-Marmagne, village natal de Jeanne, vraisemblablement aux Riaux dans la grande famille des Joussier où elle donnera naissance 9 jours plus tard à leur premier né. Un garçon prénommé Alexis

Connaissant Hippolyte et son indépendance, il ne restera pas longtemps en Saône-et-Loire et repart pour l'Isère avec Jeanne et Alexis. Ils s'installent à Saint-Jean-de-Bournay où Hippolyte exerce maintenant son métier de relieur.

C'est là que naissent Francisque Lucien en 1868 puis Louis Marius en 1872 mais ce dernier ne vivra que 3 ans.

C'est une période troublée que ces années là ! La France rurale et paysanne est en déclin au profit d'une France urbaine, ouvrière et industrielle. Hippolyte a forcément été influencé par les grèves du Creusot et il a entendu parler des troupes de Napoléon III envoyées pour intimider les ouvriers de Schneider qui réclamaient la gestion des caisses de solidarité. En Isère aussi avec la crise économique de 1868, la hausse des prix en résultant, des mouvements de grève importants toucheront tous les secteurs : mineurs de La Mure, charpentiers de Vienne, tailleurs de pierre de Montalieu, imprimeurs sur étoffe de Bourgoin, ouvriers en soie de La-Tour-du-Pin, métallurgistes de Vienne puis menuisiers, charrons, cordonniers, blanchisseurs se mettent en branle.

Puis vient la guerre franco-prussienne de 1870 et si la région fut épargnée par les combats l'effort militaire demandé en hommes fut important.

A Saint-Jean-de-Bournay la vie continue pour le jeune couple et leurs deux garçons. Hippolyte travaille dur et il est probable que, malgré la crise, les affaires marchent bien. 

Nous sommes en 1877. Hippolyte s'installe à Bourgoin où il devient  propriétaire d'une librairie - reliure au 3 Place d'Armes. Hippolyte qui possède un bon savoir-faire en reliure, aspire à devenir quelqu'un. Le commerce lui permet ainsi d'entrer plus facilement dans la société berjallienne. En 1907 Bourgoin compte 7 librairies selon l'Annuaire officiel de la librairie la concurrence doit être rude. Mais Hippolyte sait manoeuvrer être libraire, relieur, éditeur voilà un bon passeport pour entrer dans la bonne société et Jeanne le seconde activement en tenant la librairie. Il ne manque pas d' initier ses fils à la reliure et ceux-ci travailleront un temps avec lui . 

En 1890 il édite un fascicule de six pages d'un poète dauphinois Eugène Chenal dont le titre est "Remembrance" . Ce poème a été déclamé le 16 février 1890 au banquet des combattants de 1870-1871.

La vie d'Hippolyte et de Jeanne se poursuit agréablement, il y a des rentrées d'argent, Hippolyte connaît plein de monde, ils possèdent une belle maison de campagne à Maubec, la Villa des Tilleuls, bref ils s'embourgeoisent.

Mais le malheur frappe à leur porte et Jeanne décède à Bourgoin dans son domicile Place d'Armes le 13 août 1892 à 43 ans. L'acte de décès mentionne qu'elle est libraire et que les témoins sont un imprimeur sur étoffes et un relieur, probablement collègues et amis d'Hippolyte.

 

Maubec, la Villa des Tilleuls de Jeanne et d'Hippolyte . Vers 1872 ?

Maubec, la Villa des Tilleuls de Jeanne et d'Hippolyte . Vers 1872 ?

Hippolyte a 47 ans, un métier et des activités nombreuses, ses fils avec lesquels les relations ne sont pas des meilleures volent maintenant de leurs propres ailes mais il a besoin compte tenu de sa position sociale de se retrouver une épouse. C'est chose faite très rapidement et 7 mois après le décès de Jeanne il se remarie.

Marie Clémentine Favre a 35 ans elle est originaire de Beaucroissant et en mars 1893 ils se marient à Rives.  La mère de Marie est libraire, travaille-t-elle chez Hippolyte ? Un mariage de raison, peut être d'intérêt connaissant Hippolyte. Un contrat est établi chez Maître Gamet Marnier à Rives. Les parents d'Hippolyte sont présents pour assister à ce second mariage.

D'autant plus qu'Hippolyte, très actif, est aussi engagé dans les sociétés de secours qui ont pris naissance après 1850  sous la deuxième république. Promulguées par Louis Napoléon Bonaparte, ces sociétés font des fonds de réserve pour venir en aide aux ouvriers en cas de maladie, d'infirmité, d'accidents. Et Hippolyte se souvient certainement des grèves du Creusot ... Ces sociétés font suite aux corporations et précéderont les mutuelles créées en 1945. On sait par le JORF du 02/08/1910 n° 208, page 6664 qu'Hippolyte a reçu une récompense honorifique pour services rendus à la mutualité : une médaille de bronze en tant que vérificateur général de la société de bienfaisance mutuelle et fraternelle de Bourgoin. D'ailleurs sur le caveau de la famille dans le cimetière de Bourgoin, on peut également lire qu'Hippolyte fut Président de la Société de Secours Mutuels de Bourgoin. Autre distinction, en 1912 il sera nommé Officier d'Académie .

Hippolyte toujours à la recherche de reconnaissance est au faîte de sa réussite sociale, lui le fils du maître cordonnier d'Izeaux. Ses fils Alexis et Francisque ne manqueront pas de railler son embourgeoisement et sa propension à chercher les honneurs. Alexis prend un malin plaisir à l'appeler Hippocrite !

Hippolyte conservera toujours son domicile au 3 Place d'Armes au dessus de la librairie. Il accueillera un temps sa belle-mère, veuve, Clémentine Bressieux et sa belle-soeur Rosalie Favre (recensement de 1896). En 1901 on compte même une domestique Antoinette Rivoire d'Izeaux.

De son mariage avec Marie Favre naîtra une première fille Marcelle née en 1894, puis une seconde Gabrielle née en 1896. Entre les deux naîtra Marthe, sa petite fille, fille de Francisque, notre grand-mère. 

Hippolyte s'éteindra en 1926 à l'âge de 81 ans, sa seconde épouse Marie lui survivra jusqu'en 1948.

 

Cartes postales éditées par Brun-Buisson
Cartes postales éditées par Brun-Buisson

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Calendrier de 1895 de la Librairie Brun-Buisson

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